Rosmarie Tissi, Grand Prix Design Suisse 2018

Née en 1937, Rosmarie Tissi grandit dans un milieu de musiciens. Elle suit un apprentissage de graphiste chez Siegfried Odermatt, graphiste autodidacte réputé, à Zurich et travaille dix ans pour différentes entreprises. Elle fonde en 1968 avec son maître d’apprentissage l’atelier commun O&T. Son œuvre graphique se distingue par un style techniquement pur, mais non dogmatique. La manière d’intégrer la typographie peut être considérée comme un élément marquant de son style, même si elle s’est régulièrement écartée de la voie linéaire du style suisse. La graphiste est également connue pour son goût du voyage qui l’a entraînée dans 70 pays, par soif de découverte ou pour animer des ateliers et des conférences auprès d’instituts et d’universités réputés. Après avoir emporté de nombreuses distinctions et récompenses, elle a reçu en 2018 le Grand Prix Design Suisse.

Quelle a été votre réaction lorsque vous avez reçu le grand prix ?

J’ai dis « mais je n’ai pas postulé ! ». En fait quelqu’un propose votre nom et le jury étudie votre travail. Parfois, vous pensez que vous n’êtes pas si reconnue ou estimée, alors j’étais très heureuse.

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Vous êtes entrées à l’AGI en 1974, aujourd’hui l’association comporte 
environ 6 fois plus d’hommes que de femmes. Vous avez débuté
votre carrière dans un milieu principalement masculin…
Comment envisagiez-vous cela ?

Honnêtement, je n’y ai jamais vraiment prêté attention. En cours nous étions seulement 2 filles. Plus tard, dans des ateliers auxquels que j’ai co-animé, j’ai eu l’impression de voir de plus en plus de femmes. Ensuite, celles-ci disparaissent … je ne sais pas si elles arrêtent ou ce qu’elles font. Les femmes me paraissent toutefois meilleures, elles sont plus sensibles et plus engagées, car elles ont plus à défendre. Les garçons étaient moins attentifs à mes conseils. Professionnellement, les hommes et les femmes ne sont pas estimés pareil, je crois que les hommes obtiennent plus facilement des commandes…

Avez vous été formé à un certain graphisme et avez-vous eu la sensation 
d’appartenir à une génération de concepteurs qui préfigurerait
un vocabulaire visuel spécifique, à savoir le style dit ‘international’ ?

Je ne me considère pas comme appartenant au style suisse. Je le trouve trop rigide et trop froid… Je n’ai jamais utilisé la Helvetica. Je passais seulement deux jours par semaine à l’école, étant en apprentissage le reste du temps. (RosMarie a été apprenti à Winterthur et au coté de Siegfried Odermatt). Au sein de mon école, la Kunstgewerbeschule Zürich, Joseph Muller-Brockman a formé de nombreuses personnes … qui ont donc eu toutes le même style.

Dès lors, quelles étaient vos influences ?

Je regardais vers l’Amérique ou l’Italie avec par exemple Gene Federico, George Tscherny, Franco Grignani…

Rosmarie Tossi prend la suite d’Odermatt pour concevoir les poster Serenaden, une manifestation culturelle axée sur la musique, à Zurich. Elle transcrit l’univers musical en signes graphiques, dans une composition qui emprunte à la synesthésie, telle que Kandinsky l’a expérimentée.
Vous composiez à la main, et l’ordinateur est arrivé... 
Comment l’avez vous intégré ? Pensez-vous que ces nouvelles technologies,
associées aujourd’hui aux canaux de diffusion tels les réseaux sociaux,
ont pu uniformiser le design graphique ?

Mon partenaire et moi travaillions ensemble mais chacun avait ses propres clients. Il était contre, mais finalement j’ai dis « il m’en faut un ! ». C’était difficile mais quand même plus rapide, et il y a plus de possibilités. Je pense que les différentes scènes graphiques préservent leurs identités. Je pourrai toujours trouver des éléments propres à un pays dans les productions graphiques. Le Japon par exemple garde son style unique.

Regardez-vous le design graphique actuel et qu’en 
pensez vous ?

Je suis plus ou moins, je suis parfois un peu déçue. Lorsque je débutais, je pensais simplement à être satisfaite de mon travail et à ce que le client le soit aussi. J’étais peut-être naïve, mais je travaillais pour trouver une solution. Le fait qu’un projet fonctionne, qu’il soit imprimé et visible dans l’espace public, était déjà bien pour moi. Aujourd’hui, j’ai l’impression que certains jeunes graphistes recherchent la notoriété. L’autre jour, j’ai vu un poster par quelqu’un de pas très connu, je me suis dis je devrais l’appeler et lui dire que c’est bien, c’était un nouveau style, quelque chose de rafraichissant. Aujourd’hui, certaines idées viennent de vraiment trop loin.. Si tu as besoin d’une explication pour comprendre le projet ou le message, ce n’est pas du bon graphisme. Parfois, je vois des choses compliquées dans la typographie, des enchevêtrements difficiles à lire… Je pense que certains suivent la tendance, ce que je fuyais pour ma part.

Affiche pour une exposition au PRATT (New York). Rosemari Tissi associe les bandes noires et blanches, propres à la designer textile Annie Albers, le T (à l’horizontal) de son nom de famille, et la géométrie de la graphiste Lustig Cohen

Retrouvez également une sélection de projets plébiscités par les Swiss Design Awards dans le étapes 248 (mars-avril).

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Source: etapes

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