Vers un design graphique éco-responsable

L’éco-responsabilité s’impose comme un enjeu contemporain du design graphique. Le 22 septembre dernier avait lieu la table ronde “Vers un design graphique éco-responsable” organisée par la revue étapes avec PERGRAPHICA® marque de papier design premium du papetier Mondi. Le ou la graphiste est de plus en plus amené·e à prendre en compte son impact environnemental dans sa pratique. Deux studios de design graphique indépendants, un papetier et un syndicat d’imprimeurs s’emparent de ce défi.

Du choix du papier, à la connaissance des labels, en passant par l’éco-conception et l’édition à l’épreuve de l’anthropocène…, voici les différents enjeux éco-responsables abordés par les intervenant·es de la table ronde “Vers un design graphique éco-responsable”. Elle s’est déroulée le 22 septembre dernier au Consulat Voltaire à Paris. Elle rassemblait Matthieu Prévost, Responsable environnement de l’Union Nationale des Industries de l’Impression et de la Communication, Aude Montserrat, Responsable développement France de Mondi, Jeanne Lepoutre et Théophile Pierdait du studio Dazd, ainsi que Florence Cortat-Roller de Bureau 205, soit une belle représentation de la chaîne de valeur d’un projet créatif.

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Table ronde au Consulat Voltaire, “Vers un design graphique éco-responsable”.

Le choix du papier

Pour Aude Montserrat, le choix du papier est fondamental dans la démarche éco-responsable d’un·e graphiste. “Le papier représente entre 50% à 75% des émissions de CO2, d’un livre imprimé et relié” précise-t-elle. Les éditeurs, les agences et les fabricants qui s’engagent à agir contre le changement climatique peuvent donc apporter une contribution positive en utilisant du papier CO2 compensé provenant de sources durables tel que PERGRAPHICA®. Le choix d’un tel papier constitue une première étape pour garantir la durabilité de projets de création, d’édition et d’emballages haut de gamme. Produit au cœur de l’Europe en Autriche, l’ensemble de la gamme PERGRAPHICA® est compensée en CO₂. Mondi travaille ainsi avec ClimatePartner pour compenser ses émissions. PERGRAPHICA® respecte les normes internationales strictes fixées par le FSC™ et l’écolabel européen. Comme toutes les marques Mondi, PERGRAPHICA® est aussi Cradle to Cradle Certified® niveau bronze. Cette norme évalue la sécurité, la circularité et la responsabilité des matériaux et des produits à travers cinq catégories de performance en matière de développement durable. Celles-ci sont la sécurité sanitaire des matériaux, la circularité des produits, la protection de l’air et du climat, la gestion de l’eau et des sols, et l’équité sociale. “Nous avons certifié notre large gamme de produits pour apporter aux clients la tranquillité d’esprit quand ils choisissent l’un de nos papiers” explique Aude Montserrat.  

Le choix d’un papier recyclé s’inscrit également dans une démarche éco-responsable. “Le papier recyclé est fait à partir de déchets post-consommation” ajoute-t-elle. C’est le cas de NAUTILUS®, la gamme de papiers recyclés de Mondi. “Ces déchets sont collectés et triés, puis revalorisés pour redevenir du papier. Il est formidable de pouvoir créer un papier de qualité supérieure à partir de vieux papiers. Cela permet de tirer le meilleur parti des ressources dont nous disposons. Toutefois, le papier ne peut pas être recyclé indéfiniment. Après quatre à six cycles environ, la fibre est épuisée. Même si tous les papiers réutilisables étaient collectés, nous finirions par en manquer pour fabriquer du recyclé”, explique Aude Montserrat. C​​’est pourquoi Mondi produit une bonne partie de ses papiers à partir de fibres dites fraîches, issues de forêts gérées durablement. Les certifications FSCTM ou PEFC de ses marques garantissent une exploitation forestière durable pour la production de pâte à papier.

Mondi en tant que groupe international est conscient de sa responsabilité envers l’environnement. C’est la raison pour laquelle le papetier s’engage, avec son plan d’action MAP2030, à proposer des produits éco-responsables et circulaires fabriqués par des employé·es engagé·es, et à agir pour le climat. Mondi ambitionne de proposer des solutions 100% recyclables, réutilisables ou compostables d’ici 2025. Le papetier publie un guide pour mieux choisir ses papiers dans une démarche éco-responsable, ici.

Labels et certifications

Pour Matthieu Prévost, Responsable environnement de l’Union Nationale des Industries de l’Impression et de la Communication, la connaissance des labels et des certifications permet aux graphistes de faire de meilleurs choix. Quatre approches structurent une démarche éco-responsable. Celle fondée sur la primauté de la conception invite les graphistes à adapter leurs formats en fonction du public et du but du support conçu, elle mène à l’éco-conception. Pour Matthieu Prévost, les graphistes ont tout intérêt à échanger avec leur imprimeur pour connaître leurs solutions de production. L’approche mettant l’accent sur la production implique de choisir un imprimeur labellisé Imprim’Vert. Il respecte un cahier des charges garantissant notamment une sécurisation du stockage de ses produits dangereux, et une gestion raisonnée de ses déchets.

Il faut aussi choisir avec soin l’encre utilisée. “Un papier peut être recyclé jusqu’à 5 à 7 fois, mais les différentes encres contaminent plus ou moins la pâte à papier et certaines peuvent rendre difficile le recyclage” affirme Matthieu Prévost. Ainsi, l’impression offset avec séchage UV est plus difficile à désencrer que l’offset traditionnel, bien que de nouveaux procédés alternatifs d’offset UV facilitant le désencrage aient été élaborés. La connaissance des labels comme Cradle to Cradle ou l’Éco-label européen constituent une troisième approche. Enfin, penser la fin de vie du support conçu est fondamental. Cette quatrième approche favorise la conception de produits recyclables. Cela réduit l’éco-contribution des clients des graphistes, qui, dès qu’ils impriment plus de cinq tonnes de papier, doivent la payer. Celle-ci est modulable, suivant un système de bonus-malus. “Plus j’éco-conçois mon produit et plus il se recycle, moins l’éco-contribution est élevée pour le client” conclut Matthieu Prévost.

Studio Dazd. Théophile Pierdait, Jeanne Lepoutre et Claire Daum.

L’éco-conception

Composé de Théophile Pierdait, Jeanne Lepoutre et de Claire Daum, le studio Dazd est spécialisé dans l’éco-conception. “Pour mon projet de diplôme à Penninghen, j’ai interrogé les automatismes présents dans nos procédés de création graphique : à l’inverse de deux-ci, quels choix faire à chaque étape pour limiter notre impact sur l’environnement ?” affirme Jeanne Lepoutre. “Nos client·es s’adressent à nous en raison de notre positionnement radical et de notre fort engagement pour l’éco-conception. Ils et elles sont prêt·es à s’impliquer dans cette démarche et à expérimenter de nouvelles solutions” affirme Théophile Pierdait.

Pour Europe Écologie Les Verts et à l’occasion des municipales du 11e et 14e arrondissements de Paris, le studio Dazd conçoit le livret de leur programme politique. Le choix d’imprimer à petit tirage en risographie et en monochrome permet de limiter l’impact du projet par la réduction du nombre d’encres et la relocalisation de la production chez des proches artisans-imprimeurs. Un risographe est par ailleurs une machine fonctionnant à froid, limitant la consommation d’électricité. Pour le dépliant du programme, le studio pense un poster A3, arborant sur la moitié du recto, un visuel de légumes de saison. Celui-ci facilite le double emploi de l’objet papier, invitant son détenteur à l’accrocher dans un deuxième temps dans sa cuisine.

Le studio réalise aussi une identité visuelle, une brochure et un dépliant pour le Syndicat Mixte des Gorges du Gardon. “Nous avons fait le choix du noir et blanc et d’une identité visuelle fondée sur un logotype modulaire, ainsi qu’un système de pictogrammes intégrés dans l’alphabet”. Facile d’utilisation, le fichier OTF des pictogrammes pèse environ 100ko, un poids plus faible que s’ils étaient sous forme d’images au format JPEG. La brochure est aussi imprimée sur le recto de papier brouillon du syndicat. “En tant que graphiste, nous avons beaucoup plus d’influence que nous le pensons. Il est toujours possible de questionner le cadrage de la commande afin de suggérer des choix plus éco-responsables. Nous interrogeons les besoins de nos commanditaires : nous les invitons à s’inscrire dans une démarche d’économie des ressources, et à trouver un juste-milieu entre objectifs et moyens” affirme Jeanne Lepoutre.

Éditer avec les principes de l’anthropocène

Florence Cortat-Roller co-dirige avec Damien Gautier le studio Bureau 205, la fonderie 205TF et les Éditions deux-cent-cinq. Ces dernières interrogent le processus éditorial à l’heure de l’Anthropocène. L’ère de l’anthropocène est un moment historique : les activités humaines ont des impacts de plus en plus forts sur les systèmes biophysiques. Les Éditions deux-cent-cinq travaillent avec l’École urbaine de Lyon. Ensemble, ils créent un studio de recherche autour de ce concept et une collection d’ouvrages intitulée “À partir de l’Anthropocène”. Florence Cortat-Roller et Damien Gautier de Bureau 205 pensent ainsi un système d’édition afin de développer une politique éditoriale raisonnée et vertueuse.

Ils fixent des principes d’édition permettant une meilleure éco-responsabilité. L’objectif est d’optimiser les ressources en pensant tous leurs formats – poche, essai, livre-image, etc. – à partir d’une feuille de 70 par 100 cm, imprimée en offset. “Le papier, la pagination et la reliure sont toujours adaptés au public visé. Nous fonctionnons à l’économie de moyens, avec une grille de composition unique pour l’ensemble des ouvrages” précise Florence Cortat-Roller. Privilégiant les circuits courts, les éditions travaillent avec un imprimeur local ou national, certifié Imprim’Vert. “Pour notre revue annuelle de 96 pages, nous demandons à l’imprimeur les papiers qui lui restent de commandes précédentes… Nous concevons alors des cahiers 16 pages, à partir de ces restes, ce qui évite un transport de papier supplémentaire” ajoute Florence Cortat-Roller. Les papiers choisis sont toujours certifiés FSC™ et PEFC.

Enfin, les éditions 205 refusent la diffusion par Amazon et le système des offices, mode d’approvisionnement des librairies ayant pour conséquence un nombre important de retours. “Nous menons aussi des workshops avec différentes écoles, comme l’École supérieure d’art et de design de Saint-Étienne, ou encore l’École nationale supérieure des sciences de l’information et des bibliothèques, pour sensibiliser les étudiant·es à l’anthropocène” conclut Florence Cortat-Roller.

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Source: etapes

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